Cette semaine, je discutais avec un
quarantenaire qui me disait que pour rien au monde il ne souhaiterait retrouver
ces 20 ans ; la faute à la conjoncture actuelle, le chômage, la crise…
Face à ses affirmations, je n’ai pas trop su quoi répondre à part un étrange « oh,
ça va, on arrive à survivre ». Qu’aurais je pu répondre ? « Tu
as raison, c’était mieux avant » ? Mais avant quoi ?
J’ai grandi en entendant deux discours différents ; d’un
coté, celui de mes parents ayant connu une France avec le plein emploi, et qui
proclame haut et fort que si on veut vraiment bosser, on trouve forcement du
travail. De l’autre, celui des médias annonçant régulièrement la fermeture de
grandes usines et la hausse du chiffre du chômage. Du coup, moi au milieu, je
me suis sentie légèrement perdue.
Je n’ai jamais connu les trente glorieuses, je suis née dans
les vingt médiocres. Le mot chômage, je le connais depuis que mon cerveau a été
en mesure de comprendre sa signification.
Lorsqu’on me parle de la difficulté des jeunes à trouver un
emploi, j’ai encore moins de point de repère. J’ai terminé mes études en
juillet 2008, deux mois avant le début de la « crise de 2008 ». Je ne
connais que le monde de l’emploi actuel, je n’ai pas la moindre idée de ce qu’est
la normalité.
J’ai trouvé mon premier emploi en quatre mois. Lorsque je ne
suis retrouvé au chômage, il ne m’aura fallu que trois mois pour avoir une
réponse positive. Dans le 2e cas, j’ai tout de même été confrontée à
une certaine frilosité des recruteurs et des mécènes de l’entreprise et entre
la réponse positive en juillet et le début de mon contrat le mois prochain, j’ai
eu le temps que réfléchir à ce cruel monde de l’emploi. Mais finalement, dans
les deux cas, j’ai obtenu ces fameux CDI que les médias nous annoncent si dur à
décrocher.
Du coup, que répondre lorsqu’on me dit que c’était mieux
avant, lorsque ma version de la normalité de la vie semble si dure à supporter pour
les générations antérieures ? On parle souvent de génération sacrifiée,
mais j’ai entendu cette expression pour ma génération, la génération précédente
et les générations futures.
Et d’ailleurs, que signifie « C’était mieux avant » ?
Aujourd’hui j’ai regardé un reportage cubain appelé « Lerideau de sucre » qui parle du mouvement des jeunes pionniers pendant l’apogée
du régime cubain dans les années 70. Les interviewés étaient sur les bancs de l’école
à cette époque, ils ne se souviennent que d’une enfance heureuse et restent
nostalgiques d’un régime communiste puissant ; mais en même temps, la plupart
des gens gardent un regard bienveillant sur leur jeunesse. Le message du film
est ce qui me semble une ritournelle récurrente « C’était mieux avant ».
Autre sujet, le pouvoir d’achat. Autour de moi, tout le monde se plain de la chute de son pouvoir d’achat. Lorsque j’entends ce discours chez des jeunes entrés dans le monde du travail depuis moins de 5 ans, je suis sceptique. Ils n’ont jamais travaillé auparavant, ils n’ont jamais eu de pouvoir d’achat, jamais eu de salaire, de factures à payer… comment sait on que l’on perd son pouvoir d’achat lorsqu’on a vécu au crochet de papa-maman ?
Et même, il y a dix ans, le budget téléphone portable,
internet, tablette tactile n’existait pas. On se créé des postes de dépense
supplémentaires et pas forcément utiles, on se créé des besoins pour finir par
venir pleurer parce que le compte en banque est vide.
Bref, plutôt que de me plonger dans la nostalgie de ma douce
enfance, je préfère regarder en face le monde dans lequel j’évolue. Je n’ai pas
envie de me plaindre de la « difficulté » du monde moderne, j’ai
juste envie d’évoluer, de faire ma place dans cette « conjoncture » en me disant que ça sera mieux demain !